jeudi 28 avril 2011

[Défi #17] "Koenigsmark" de Pierre Benoît


Quatrième de couv':
Peu de temps après son arrivée en Allemagne, au château du grand-duché de Lautenbourg-Detmold où il a été appelé comme précepteur du fils unique du grand-duc Frédéric-Auguste, Raoul Vignerte, un jeune Français, tombe amoureux fou de la grande-duchesse Aurore. En faisant des recherches à la bibliothèque du château, Vignerte découvre un terrible secret. Entraîné par sa passion, négligeant toute prudence, il va dès lors se trouver plongé au coeur d'un drame. 
Koenigsmark, premier roman de Pierre Benoit, qui devait en écrire plus de quarante, possède toutes les qualités qui lui assurèrent un immense succès : un cadre pittoresque, une atmosphère mystérieuse et envoûtante, une intrigue pleine de péripéties, un héros idéaliste, une femme fascinante.

Avis:

Premier roman de Pierre Benoît, « Koenigsmark » nous plonge dans les souvenirs de Raoul Vignerte, soldat dans les tranchées pendant 14-18. Comme la madeleine de Proust, le nom de « Lautenbourg » ravive les souvenirs de son année passée en Allemagne. Égaré dans ses études et presque sans le sou, il accepte de devenir le professeur de français et d’histoire du rejeton du Grand-Duc Frédéric de Lautenbourg. Arrivé à la cour des Lautenbourg, il va occuper le plus clair de son temps à enseigner et étudier les livres de la bibliothèque, jusqu’au jour où il rencontre la magnifique Aurore de Lautenbourg-Detmold. Veuve du frère du Grand-Duc, elle est une beauté russe au fort caractère. Elle envoûte Raoul Vignerte qui va peu à peu se rapprocher d’elle, au point de devenir son confident. Mais jamais elle ne lui rendra son amour. Comme elle le dit, elle n’aime pas vraiment les hommes. Vignerte est relégué au même rang que la charmante Mélusine, la fidèle dame de compagnie d’Aurore.

Mais résumer « Koenigsbourg » à une simple histoire romanesque ne serait pas rendre justice au reste du livre. Car parallèlement aux émois de Vignerte, nous assistons aussi à une enquête. En fouinant dans les archives de la bibliothèque, Vignerte fait une découverte qui viendra confirmer que la mort de Rodolphe de Lautenbourg n’était pas accidentelle. De cette découverte va découler des événements tragiques : incendie de la bibliothèque dans lequel décède le bibliothécaire, la mort de Mélusine (ce passage est d’ailleurs un moment très fort du roman)…

Puis l’annonce de la Guerre survient. Aurore aide Vignerte à s’échapper. Ils ne se reverront jamais, mais le roman s’achève sur un rebondissement des plus inattendus.

Du style, l’auteur n’en manque pas. Son écriture est fine, élégante, héritée des plus grands du 19ème. On ressent encore le penchant pour les descriptions, parfois un peu abusives et dont on ne perçoit pas forcément l’utilité. Hormis cela, c’est un livre qui se lit avec une grande facilité. Le mystère étant palpable, on se demande où Pierre Benoît veut nous emmener et l'on dévore les pages sans s'en rendre compte.

Des personnages, on retiendra facilement le trio principal composé de Vignerte, Aurore et Mélusine. Vignerte, par cette expérience, découvre la vie, celle qui se joue en dehors des murs protecteurs de l’université. Sûr de lui au début, il va progressivement apprendre la vraie nature des hommes dans cet univers où tout est codé et construit sur les secrets. Aurore est cette femme fatale qui semble au premier abord froide et forte, mais elle est bien plus fragile, et certains de ses actes, aussi extrêmes soient-ils, en témoignent. Mélusine est le personnage du roman qui surprendra le plus. Charmante, elle l’est trop. Sa traîtrise, elle la paiera de sa vie. La relation entre ses trois personnages, dont Aurore est le pilier, fait la force du roman. On s’attache à eux et à leur destin malheureux.

Même si je n’ai pas eu le coup de foudre pour cette histoire, j’ai passé un agréable moment, fait de surprises puisque j’ignorais absolument tout du contenu lorsque j’ai commencé ma lecture.

Note: 3,5/5

Défi lecture V&S et Abfa, catégorie classique

jeudi 21 avril 2011

[Défi #16] "Othello" de William Shakespeare



Célèbre tragédie shakespearienne, "Othello" met en scène le drame de la jalousie, à la fois sociale et amoureuse.

Fraîchement marié à Desdémone, Othello (le Maure vénitien) est convié à détruire la flotte turque. Mais l’affrontement n’aura jamais lieu à cause d’une tempête. Il devient alors le gouverneur de Chypre où il part s’installer avec sa tendre épouse et ses fidèles serviteurs. Parmi eux, se trouve Iago, le perfide, celui par qui le drame arrivera. Contrarié de ne pas devenir le second d’Othello, à la place de Cassio, il va mûrir sa vengeance. Il commence par mettre en défaut Cassio, afin qu’il perde l’estime d’Othello. Une fois Cassio évincé, il s’attaque à Othello en lui insufflant le terrible sentiment de la jalousie. En lui racontant que Desdémone et Cassio entretiennent une relation plus qu’amicale, il entraîne Othello vers de sombres desseins qui déboucheront sur un dramatique dénouement comme Shakespeare savait le faire.
    
« Othello » est un drame domestique comme on peut en trouver dans la vraie vie, et c’est pour cette raison que l’histoire nous parle encore aujourd’hui. De mon point de vue, j’ai trouvé l’ensemble assez classique, et sans grande surprise. Même le jeu de la manipulation est efficace de cruauté, je dois avouer que ce n’est pas la pièce de Shakespeare qui me marquera le plus.

Ce qui fait, à mes yeux, la force de cette pièce de théâtre, c’est le personnage de Iago. Impossible de rester neutre devant autant de malice. Habile manipulateur, nous assistons (en spectateurs impuissants) à l’élaboration de son machiavélique dessein. Ses paroles, tour à tour aimables et venimeuses, font mal et nous donnent envie de le lapider en place publique. Il est intéressant de voir comment il parvient à embrouiller l’esprit des autres personnages, comment il fait naître le sentiment de jalousie dans le cœur d’Othello, trop naïf pour cerner la personnalité machiavélique de celui qu’il estime le plus.

C’est une œuvre assez aisée à lire. À part quelques tournures un peu poussiéreuses (qui ont leur charme), l’ensemble est facile à appréhender. Ce que j’apprécie dans les dialogues de Shakespeare, c’est cette capacité de nous faire ressentir les sentiments des personnages. Le rythme est soutenu, il n’y a pas véritablement de temps mort et l'on sent au fil des pages la tension qui monte.
   
En bref, Othello ne marquera peut-être pas ma vie de lectrice, même si j’ai aimé découvrir ce texte qui doit sûrement être plus passionnant à découvrir sur scène.

Note: 4/5

Défi lecture V&S et Abfa, catégorie Théâtre
   

mardi 19 avril 2011

[Défi #15] "Shin Shunkaden" de Clamp



Shin Shunkaden est un one-shot de Clamp, publié chez Glénat en 2005, et qui s’inspire très librement d’une célèbre légende coréenne. D’ailleurs, Clamp n’hésite pas à spécifier au tout début de l’histoire que l’héroïne de la légende « a quelque peu changé ». Nous suivons donc les aventures de Chu Nyan, la fille de la célèbre prêtresse shinban Myon Fa. L’histoire commence par un fait divers montrant du doigt le pouvoir abusif du ryanban (gouverneur chargé de prélever les impôts), Chu Nyan vient au secours de la jeune victime et montre clairement qu’elle se révolte contre l’autorité. Se croyant protégée par son statut, elle est loin d’imaginer que son geste va entraîner la mort de la personne qui lui est la plus chère au monde. Une nouvelle vie commence pour elle. Elle se joint à Muron, l’Amenosa (l’espion chargé de s’assurer que les ryanban n’abusent pas de leur autorité). À eux deux, ils vont venir en aide aux populations soumises à la tyrannie de leur ryanban.

L’histoire ne connaît pas de temps mort. Il y a des scènes d’action, de la magie, des disputes entre Chu Nyan et Muron. Le seul point négatif : la fin. On reste avec des zones d’ombres, des non-dits qui donnent une désagréable impression d’inachevée. On dirait une sorte de mise en bouche pour nous donner envie d’aller plus loin, pour nous pousser à découvrir la véritable légende de Chu Nyan et Muron.

Chu Nyan est l’axe central du manga. C’est une ado avec une personnalité qu’on ne peut qu’aimer. Le cœur sur la main, joviale, elle donne envie d’être son amie. Mais il ne faut pas se fier à son sourire, car la jeune fille peut être une vraie furie qui n’a pas peur de donner des coups. Et sa plus grande victime est Muron. Le pauvre n’arrête pas d’être martyrisé pour n’importe quel prétexte. Exemple à suivre… ou pas, il n’en reste pas moins qu’on rit de bon cœur lorsque le poing de Chu Nyan apparaît et qu’on voit la tête de Muron en pleure dans la vignette suivante. Malgré le comportement de Chu Nyan, Muron est amoureux d'elle. Et même s’il apparaît comme nigaud, Muron est loin d’être faible. C’est l’Amenosa, il a tout pouvoir sur les ryanban et accessoirement dans la version clampesque il pratique la magie. Bien sûr, on aurait aimé une suite, histoire de voir comment allait évoluer leur relation.

Graphiquement, on reconnait immédiatement le style des Clamp, c’est fin et joli. Seul inconvénient, le format de publication qui est, certes très facile à mettre dans un sac à main, mais qui est trop petit pour pleinement apprécier le graphisme.

Bien sûr, il faut aimer le travail de Clamp pour dévorer ce manga, car on retrouve ici tout ce qui fait leur univers : amour, amitié, humour, magie, etc. Alors évidemment nous sommes dans du Clamp et il faut s’attendre à des attitudes parfois un peu neuneu venant de la part des personnages, à un humour bon enfant et à une bonne dose de gentillesse attendrissante. Pour ma part, ça me fait toujours rire.

J’ai donc passé un bon moment, peut-être parce que je suis à la base assez bonne cliente de la production des Clamp (même si je n’ai pas tout lu).

Note: 4/5

Défi V&S et Abfa, catégorie manga/BD

mardi 12 avril 2011

[Défi #14] "Le faucon de Malte" de Dashiell Hammett


Quatrième de couv':
Beaucoup auraient remué ciel et terre pour se l'approprier, ce faucon. Certains y avaient déjà laissé leur peau. Le détective Miles Archer lui-même y était resté. Mais son associé, Sam Spade, rusé, tenace, entreprenant jusqu'au cynisme, les manoeuvre comme des enfants. Il esquive même de justesse les pièges que lui tend Brigid O'Saughnessy, la fausse ingénue, et touche au but. Mais saura-t-il tirer profit de cette victoire ?

Mon avis:

Parfois, on se demande, en refermant un livre, pourquoi on ne l’a pas lu plus tôt. C’est ce qui m’est arrivé avec « le faucon de Malte » de Dashiell Hammett. Traînant sur une des étagères de la bibliothèque familiale depuis les années 90 (oui, mon édition date de 1992), c’est un roman qui avait rejoint ma pal à l’époque du lycée, mais un je-ne-sais-quoi m’a toujours fait hésiter à le lire. Et je ne peux que saluer le bienfait du défi de lecture qui m’a donné un bon coup de pied dans le postérieur pour liquider certaines lectures en retard (bon, j’avoue qu’il s’agit d’un énorme retard dans le cas présent).

Vous aurez donc compris que je ne regrette pas cette lecture. Bien au contraire, j’ai envie de la recommander à celles et ceux qui aiment les polars ou qui souhaitent découvrir le genre.

Publié en 1936, « le faucon de Malte » met en scène l’un des détectives les plus célèbres. Il s’agit de Sam Spade, héros principal du roman (et de trois autres nouvelles), il est l’incarnation de « l’homme », vous savez de ce type qui dit-on revient à la mode, que l’on qualifie de macho. Sam Spade a une personnalité de mâle dominant, sûr de lui, roublard (il le faut quand on veut duper les truands), un chouia cynique et sarcastique, protecteur avec la gent féminine qu’il estime toutefois inférieure à lui. Même s’il salue les compétences d’Effie, sa charmante secrétaire, il lui fait bien comprendre que c’est lui qui résout les enquêtes et que de ce fait il est bien plus intelligent qu’elle. Même si leur relation est assez archaïque (le féminisme est quand même passé par là, enfin en théorie…), elle est la plus sincère du roman, car il n’est pas vraiment question de jeu de dupe entre eux. En revanche, dans le reste du roman, le casting que nous propose Dashiell Hammett est plutôt relevé : vamp, veuve joyeuse, truand à l’embonpoint répugnant, petite frappe… toute la panoplie du parfait roman noir y est. Et c’est savoureux ! Aucun n’est blanc ou noir, y compris Sam Spade et les flics. Dashiell Hammett nous montre ainsi que la frontière entre le bien et le mal est des plus floues et qu’il est parfois aisé de pencher vers l’illégalité.

Autre point fort, le style de l’auteur. Avec ce roman, on sent les prémices d’une écriture très répandue de nos jours, à savoir le style cinématographique. Pas toujours très bien utilisé malheureusement, le style est pourtant ici très efficace. On a un rythme soutenu, avec de nombreux dialogues, des scènes de bagarres, des morts, des rebondissements et de fausses révélations qui brouillent notre jugement. Même si les descriptions sont minimalistes, elles apportent suffisamment d’éléments pour cerner psychologiquement et physiquement les personnages. 


En somme, c’est un livre sans réelle faiblesse (à part peut-être une fin pas très surprenante) qui se laisse lire sans aucune difficulté et qui peut encore aujourd’hui servir de référence.

Note: 5/5

Défi lecture V&S et Abfa, catégorie classique



mercredi 6 avril 2011

[Défi #13] "L'enfant des cimetières" de Sire Cédric


Quatrième de couv':


Un fossoyeur vivant près d'un cimetière est pris d'une folie hallucinatoire et tue toute sa famille avec un fusil à pompe avant de se suicider. Un adolescent, se croyant poursuivi par des ombres, menace de son arme les occupants d'un hôpital et tue Kristel, une artiste peintre. Plongé dans cette épidémie meurtrière, David, photojournaliste et compagnon de Kristel, décide de mener l'enquête. Avec l'aide d'Aurore, une jeune collègue ambitieuse, et du commandant de police Vauvert, ils vont être bientôt confrontés à l'inimaginable. Meurtres sordides et suicides pour le moins étranges s'enchaînent sous les yeux terrifiés des trois enquêteurs. Nathaniel, aussi insaisissable que
maléfique, n'est pas un jeune homme ordinaire... L'enfant des cimetières prend un plaisir manifeste à tuer, à prolonger l'agonie douloureuse de ses victimes. Homme ou démon ? Rien ne semble pouvoir l'arrêter dans son abominable quête. David, qui n'a plus rien à perdre, est prêt à tout pour venger Kristel, quitte à suivre Nathaniel jusqu'en enfer.


Avis:


Il aura fallu la publication de « l’enfant des cimetières » en poche pour me décider à lire du Sire Cédric. Autant le dire immédiatement, ce roman n’aura pas été une véritable révélation pour moi. J’ai eu l’impression de me replonger dans certains bouquins américains des années 80-90 où l’ésotérisme était utilisé à toutes les sauces. Ce n’est pas que ce soit désagréable, au contraire j’aime bien ce genre d’histoires, mais comme on dit, il n’y a « rien de nouveau sous le soleil ».


L’intrigue, que j’ai trouvée assez classique, est plutôt bien menée et éveille néanmoins notre intérêt jusqu’à la fin. Sire Cédric sait nous laisser dans le flou en distillant très peu d’informations. Il se concentre sur l’évocation de la légende urbaine et sur les scènes macabres pour divertir notre esprit et nous éloigner de la véritable enquête, afin de nous surprendre avec les révélations finales. Ça fonctionne… pendant un certain temps. Je dois avouer qu’à un moment j’ai eu la sensation de faire un peu du sur place. Il faut dire que le côté gore, chez moi ça ne fonctionne pas vraiment. Pas de chair de poule, ni de peur au rendez-vous… du coup l’ennuie a un peu guetté. Heureusement dans les 150 dernières pages, le rythme a repris de manière assez effrénée et j’ai repris goût à lire le livre.

Concernant les personnages, j’ai eu un peu de mal à me lier à eux. Certains d’entre eux manquaient de profondeurs, et ressemblaient plus à des figurants. Le commandant Vauvert est celui qui m’a le plus plu, car sa personnalité est en relief et il arrive à nous surprendre dans son comportement. David, autre personnage principal, fait naître un sentiment de pitié puisqu’il vient de perdre la personne qu’il aimait le plus. Et en même temps, il a su me faire rire ; principalement dans les quelques passages où il est blessé. Au lieu de penser à la gravité de ses blessures, il pense aux microbes qu’il pourrait attraper. Je sais, c’est idiot d’avoir retenu un détail pareil, mais ça m’a fait rire. Les méchants (que je ne citerai pas pour éviter de spoiler) sont vraiment bien barrés, et frôlent tout de même le cliché de base.

En conclusion, je dirais que c’est un livre idéal pour tuer le temps sans trop se triturer les neurones, idéal aussi à quiconque veut se faire peur avec des scènes sanguinolentes. Pour ma part, l’expérience m’a moyennement convaincue. Pourtant, je lirai encore du Sire Cédric, histoire de voir…

Note: 3/5

 Défi lecture V&S et Abfa, catégorie imaginaire