mercredi 16 février 2011

[Défi #8] "L'exorciste" de William P. Blatty


Quatrième de couv':

Pour Chris MacNeil et sa fille Regan, une adolescente de douze ans, la vie s'écoule heureuse et aisée dans un quartier bourgeois de Washington. 
Et puis, un jour, des bruits étranges résonnent dans la calme demeure, des objets disparaissent, des meubles sont déplacés. Quant à Regan, d'étranges métamorphoses la défigurent, des mots obscènes jaillissent de sa bouche. 
Tandis que peu à peu la personnalité de l'enfant se dédouble et se disloque face aux médecins impuissants, des profanations souillent une église voisine, un crime mystérieux a lieu sous les fenêtres des Mac Neil. La police, trop perspicace, est saisie d'horreur devant l'atroce vérité. Damien Karras, prêtre et psychiatre, sera-t-il le seul recours ?
De ce roman dont il est l'auteur, William P. Blatty a tiré un film qui a connu un extraordinaire succès - de scandale et de terreur- tant en Europe qu'en Amérique.

Mon avis:

« L’Exorciste » a été le bestseller qui a fait vibrer l’Amérique en 1971, et cela même avant son adaptation cinématographique en 1973. Durant 57 semaines d'affilée, il a figuré dans la liste des bestsellers du New York Times, et pendant 17 d’entre elles, il a été numéro un. Même si aujourd’hui, on connaît davantage « l’Exorciste » pour le film, il est important de ne pas perdre de vue sa version romancée qui, à mon avis, est tout aussi captivante et dérangeante. Autant le dire tout de suite, ce n’est pas un livre à mettre entre toutes les mains. Même, moi qui suis plutôt imperturbable devant les films d’horreur (je les trouve généralement ridicules et pas très crédibles), j’ai ressenti quelques palpitations par moments. L’atmosphère y est d’ailleurs pour beaucoup. Dès les premières pages, un sentiment désagréable s’installe et s’accroit progressivement. À chaque changement du comportement de Regan, on sent le cauchemar se rapprocher. Et lorsque le réalisateur et ami de Chris MacNeil est finalement retrouvé mort, on sait déjà qu’il est trop tard. Commence alors la descente aux Enfers de la jeune Regan et de son entourage. Et l’auteur ne nous épargne pas, alternant les passages malsains de la possession et ceux où les autres protagonistes cherchent à comprendre, partagés entre le doute et la peur - sentiments qui finissent par nous gagner.


Mais que se passe-t-il réellement dans la chambre de l’adolescente ? Jusqu’au bout, nous ne saurons pas vraiment si Regan a été victime d’une possession démoniaque ou tout simplement d’un trouble de la personnalité multiple. Certes, on a tendance à se laisser porter par l’hypothèse que le démon Pazuzu possédait bel et bien l’adolescente, peut-être dans l’espoir d’avoir un peu plus peur ; et d'un autre côté, on peut se contenter d’adhérer au discours de la psychanalyse et voir dans le cas de Regan une forme de maladie mentale. Toutes les interprétations sont possibles, et William P. Blatty ne s’engouffre pas dans le cliché de l’histoire démoniaque de base. Il expose avec intelligence les deux théories et les affirme possibles l’une et l’autre. C’est d’ailleurs ce qui fait tout l’intérêt de ce roman et qui lui confère un caractère réaliste. L’interprétation nous appartient donc en quelque sorte.

« L’Exorciste », c’est aussi un roman sans réel personnage principal. Regan est certes le pilier du roman, puisque l’intrigue se concentre autour de son cas ; mais au-delà de cet aspect c’est un personnage qui reste assez secondaire qui se contente de nous offrir quelques passages bien glauques. Chris MacNeil, sa mère, est une femme intéressante. Il m’a semblé voir en elle le reflet de l’auteur ; même si elle est émotionnellement touchée, elle a un regard assez omniscient sur la situation. Ne comprenant pas ce qui arrive, elle va se documenter, s’interroger et tester les différentes parties susceptibles d’aider sa fille. Elle ne croit pas en Dieu et encore moins en la médecine, pourtant elle va leur confier le cas de Regan. Sa méfiance va peu à peu faire apparaître les limites d’applications de ces deux domaines. Faut-il croire davantage en la psychanalyse ou en la religion ? Peut-il exister une complémentarité entre les deux ? Son meilleur interlocuteur est le père Karras, jésuite, psychanalyste de formation et en pleine crise spirituelle. À eux deux, ils vont semés le doute dans notre esprit, nous forcer à peser le pour et le contre, sans jamais définitivement nous donner la réponse. C’est habile, tortueux et efficace. S’ajoute à ce duo, l’inspecteur Kinderman. Au premier abord, on se demande ce qu’il vient faire là. Certes, il enquête sur la mort de Burke Dennings, mais sa présence a pour but de soulever une question éthique : peut-on condamner pour ses crimes quelqu’un qui n’a pas toute sa raison ? Là aussi, pas de réponse, à nous de nous faire notre propre opinion.

Vous aurez compris, « l’Exorciste » est loin de ressembler à un banal roman horrifique, destiné à nous faire trembler de peur. Il s’agit d’une œuvre intelligente qui mériterait d’être rééditée, surtout qu’elle passe plutôt bien le cap des 40 ans, contrairement à sa version cinématographique. Un livre à découvrir, mais aussi à garder à portée de main, car il constitue une bonne base de recherche sur l’occultisme et la démonologie.

Bref, si vous mettez la main sur ce livre, lisez-le !!

Note: 5/5

 Défi lecture V&S et Abfa, catégorie Imaginaire

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